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Endométriose et hystérectomie

Cet article est la traduction en français d’un article en anglais publié sur endometriosis.org. Vous trouverez la liste des co-auteurs en bas de page. L’article original est à retrouver ici : http://endometriosis.org/news/research/endometriosis-and-hysterectomy/

Vous avez décidé de subir une hystérectomie dans l’espoir que cela soulage les symptômes de votre endométriose ? Prenez le temps d’étudier toutes les options qui s’offrent à vous et de considérer les conséquences irréversibles de l’hystérectomie.

Il n’est pas garanti que l’hystérectomie (ablation chirurgicale de l’utérus) soulage les symptômes de l’endométriose. De ce fait, l’hystérectomie ne peut pas être considérée comme un traitement ou un remède à l’endométriose.

De plus, la qualité de l’opération chirurgicale dépend énormément du chirurgien, et si toutes les lésions d’endométriose ne sont pas enlevées en même temps que l’utérus (et/ou les ovaires), l’endométriose risque de persister ainsi que les symptômes associés. Vous risquez donc de souffrir des symptômes de la maladie même après l’intervention.

Rappelons ce qu’est l’endométriose : une maladie où des tissus similaires à la muqueuse de l’utérus (l’endomètre) se trouvent à l’extérieur de l’utérus. Cela signifie que souvent l’utérus en lui-même est un organe normal et sain. Retirer un organe sain risque d’avoir peu d’effet sur votre douleur, surtout si les autres causes des symptômes ne sont pas prises en charge.

Dans certaines situations, l’utérus peut être affecté par d’autres causes de douleur. C’est le cas de l’adénomyose, où des cellules similaires à l’endomètre se trouvent à l’intérieur de la couche musculaire de l’utérus. Cette pathologie, semblable à l’endométriose, est quant à elle généralement améliorée par une hystérectomie.

Pour les personnes ayant de l’endométriose et qui ont des douleurs menstruelles sévères ou des saignements menstruels abondants, l’hystérectomie peut apporter une amélioration voire résoudre totalement ces symptômes.

Cela doit être mis en balance avec le caractère invasif et définitif de la procédure. Il faut aussi prendre en compte le fait que pour certaines personnes avec de l’endométriose, l’intervention ne permet aucune évolution de la douleur.

Définition de l’hystérectomie

L’hystérectomie correspond à l’ablation chirurgicale de l’utérus à travers la paroi abdominale ou le vagin. Il existe deux types d’hystérectomies : totale et subtotale.

Hystérectomie totale : le corps de l’utérus et le col de l’utérus sont enlevés.

Hystérectomie subtotale (ou partielle) : le corps de l’utérus est enlevé, mais le col de l’utérus est laissé intact.

Quand d’autres organes pelviens sont enlevés au moment de l’hystérectomie, les termes suivants s’appliquent :

Ovariectomie : ablation d’un ovaire. On parle d’ovariectomie unilatérale lorsqu’un seul ovaire est retiré. Lors de l’ablation des deux ovaires (ovariectomie bilatérale), la.e patient.e expérimente une ménopause instantanée et irréversible.

Salpingo-ovariectomie : ablation des trompes de Fallope et d’un ovaire. On parle de « salpingo-ovariectomie bilatérale » (SOB) lorsque les 2 trompes et ovaires sont enlevés.

Méthodes de l’hystérectomie

Les hystérectomies sont pratiquées de trois manières différentes, selon différentes combinaisons : abdominale, vaginale ou par laparoscopie.

Si vous envisagez l’hystérectomie, discutez avec votre chirurgien.ne de la meilleure technique. Comme pour tout type de chirurgie, assurez-vous que lae chirurgien.ne que vous choisissez a une expérience considérable dans la pratique de la méthode choisie, et qu’iel sait enlever toutes les lésions d’endométriose pendant l’opération.

Hystérectomie abdominale totale (HAT)

Une incision horizontale ou verticale est faite sur la partie basse de la paroi abdominale. L’utérus et le col de l’utérus sont enlevés à travers l’incision (avec ou sans les trompes de Fallope et les ovaires). Le temps de convalescence est habituellement plus long qu’avec les autres méthodes. Les lésions d’endométriose doivent être retirées pendant la HAT.

Hystérectomie vaginale

La peau autour du col de l’utérus (au-dessus du vagin) est ouverte, et l’utérus et le col de l’utérus (avec les trompes de Fallope et les ovaires ou non) sont enlevés par cette ouverture. Il n’y a pas d’incision abdominale, ce qui permet généralement une convalescence plus rapide. Il est important de noter qu’une hystérectomie vaginale ne permet pas d’avoir une visibilité suffisante pour s’assurer que tout substrat d’endométriose est ôté pendant l’intervention.

Hystérectomie par laparoscopie

On parle de laparoscopie lorsqu’une caméra est placée dans l’abdomen pour limiter l’incision. La laparoscopie est privilégiée par rapport à l’hystérectomie abdominale puisqu’elle permet un temps de convalescence plus court. A noter : l’endométriose peut être enlevée plutôt facilement avec ces 3 variantes :

Hystérectomie laparoscopique totale : l’ensemble de la procédure est pratiqué par laparoscopie. L’ablation de l’utérus et du col de l’utérus ainsi que la fermeture des tissus vaginaux sont réalisées grâce au guidage par laparoscope (caméra) depuis le côté de l’abdomen.

Hystérectomie vaginale assistée par laparoscopie : la partie haute de l’hystérectomie est pratiquée grâce à un guidage du laparoscope. Ensuite, l’intervention chirurgicale est finie par voie vaginale avec la fermeture des tissus vaginaux depuis le vagin.

Hystérectomie subtotale laparoscopique : il s’agit d’une hystérectomie partielle (le col de l’utérus est conservé) pratiquée grâce à un guidage par laparoscope.

Effets à long terme d’une hystérectomie

Subir une hystérectomie peut présenter des conséquences négatives sur la santé à long terme. Plusieurs études récentes sur le sujet sont assez catégoriques, en particulier en ce qui concerne les personnes subissant une hystérectomie avant leur ménopause naturelle.

Par exemple, une étude sur une grande cohorte a montré que les personnes avec de l’endométriose subissant une hystérectomie avant leurs 40 ans présentaient un risque plus élevé de développer des maladies coronariennes.

Une autre étude récente suivait des personnes (ayant de l’endométriose ou non) ayant eu une hystérectomie avec préservation des ovaires avant leurs 35 ans. Elle a montré que ces personnes présentaient une multiplication par plus de 4 du risque d’insuffisance cardiaque congestive et un risque 2,5 fois plus grand de maladie coronarienne. De plus, ces personnes avaient 13% de plus de risque d’hypertension artérielle, et un risque d’obésité 18% plus élevé.

Deux études ont suggéré que le risque de démence est augmenté de manière significative après une ablation chirurgicale avant l’arrivée de la ménopause naturelle, ce risque augmentant d’autant plus que les ovaires sont ôtés à un jeune âge.

Il nous reste beaucoup à apprendre en ce qui concerne le rôle que notre utérus et nos ovaires (ainsi que les hormones et enzymes qui s’y trouvent) jouent en termes d’interactions avec nos autres organes vitaux, et conséquemment leur contribution à notre santé globale sur le long terme. Le message pourrait être celui-ci : ne prenez pas de décision hâtive à propos de l’ablation d’organes (surtout s’ils sont sains) …

La décision de l’hystérectomie

Décider de subir ou non une hystérectomie est une décision lourde et personnelle. Si votre médecin vous a conseillé de subir une hystérectomie, il est possible voire conseillé de solliciter l’opinion d’un second médecin.

Parlez avec votre médecin de tous les risques et des effets secondaires possibles. Lisez des livres, des articles et des témoignages personnels à propos de l’hystérectomie (en particulier l’expérience de personnes ayant de l’endométriose).

Comme mentionné précédemment, il est important de comprendre que certaines personnes expérimentent une persistance de l’endométriose et/ou des symptômes liés, même après que toute l’endométriose a été enlevée au moment de la procédure. Et enfin, considérez cette décision avec une attention toute particulière, parce que la décision de l’hystérectomie est irréversible.

Ensuite, forgez votre propre opinion et décidez.

Remerciements

Cet article s’appuie sur l’article original à propos de l’hystérectomie pour l’endométriose, écrit par Ellen T. Johnson en 2005. Il a été mis à jour par les co-auteurs suivants :

  • Jason Abbott PhD Membre du Collège Royal des Obstétriciens et Gynécologues(Hons), Professeur à l’UNSW (Sydney, Australie); Directeur médical de « Endometriosis Australia »; et Président de la Société Australienne d’endoscopie et de chirurgie gynécologique (AGES)
  • Heather Guidone, éditrice associée à endometriosis.org, et curatrices du Centre de Recherche sur l’endométriose (USA)
  • Andrew Horne PhD Membre du Collège Royal des Obstétriciens et Gynécologues, professeur en gynécologie et sciences reproductive à Edinburgh University, UK, and conseilleur médical à « Endometriosis UK »
  • Lone Hummelshoj, éditrice et rédactrice en chef à Endometriosis.org
  • Neil Johnson MD CREI FRANZCOG FRCOG MRCGP, Professeur en santé reproductive et gynécologue, Auckland, Nouvelle-Zélande, et Président de la World Endometriosis Society (WES)

Réferences

  1. Johnson NP, et al. Consensus on current management of endometriosis. Hum Reprod 2013;28(6):1552-68.
  2. Dunselman GA, et al. ESHRE guideline: management of women with endometriosis. Hum Reprod 2014;29(3):400-12.
  3. Endometriosis: diagnosis and management. NICE Guideline NG73, September 2017
  4. Berlanda N, et al. The outcomes of repeat surgery for recurrent symptomatic endometriosis. Curr Opin Obstet Gynecol 2010;22(4):320-25.
  5. Selçuk İ and Bozdag G. Recurrence of endometriosis; risk factors, mechanisms and biomarkers; review of the literature. Journal of the Turkish German Gynecological Association 2013;14(2):98-103.
  6. Mu F, et al. Endometriosis and risk of coronary heart disease. Circ Cardiovasc Qual Outcomes 2016 Epub.
  7. Laughlin-Tommaso SK, et al. Cardiovascular and metabolic morbidity after hysterectomy with ovarian conservation: a cohort study. Menopause 2018 [epub ahead of print]
  8. Rocca WA, et al. Hysterectomy, oophorectomy, estrogen, and the risk of dementia. Neurodegener Dis 2012;10:175-78

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