Aujourd’hui la question de la précarité et des difficultés dans le monde du travail lorsque l’on a de l’endométriose est quasiment inexplorée.
Les articles de presse oublient malheureusement souvent celles qui ne peuvent travailler et vivent sous le seuil de pauvreté. Lorsqu’ils parlent de celles qui travaillent, ils évoquent rarement le cas des malades qui ont des douleurs quotidiennes. Le sujet des études est quant à lui le grand oublié des journalistes.
Nous déplorons également le manque d’études statistiques et d’analyses sociologiques sur le sujet. Nous avons donc voulu mettre en avant des témoignages qui évoquent nos difficultés sous toutes leurs formes. Ils ont pour but de faire prendre conscience de nos réalités, souvent dures, précaires et semées d’embûches.
Cette semaine, nous vous proposons aujourd’hui un focus sur deux témoignages autour des difficultés au travail lorsqu’on a de l’endométriose.
Gérer le travail en plus de « cacher » sa douleur
« Mes difficultés au travail : libérer du temps pour aller aux rendez-vous médicaux, souvent en pleine journée, m’arranger avec ma manager, qui est heureusement conciliante et compréhensive. Néanmoins, j’ai cette petite voix en moi qui me dit que ce n’est pas correct de faire ces rendez-vous sur mon temps de travail.
Enfin, le plus difficile à gérer, c’est bien sûr la douleur : dans les transports en allant au travail, toujours aux mêmes heures ; la journée de travail à gérer en plus de « cacher » sa douleur, pouvoir suivre des conversations, des réunions, ou parfois tout simplement tenir debout, dans un couloir ou à la machine à café.
Si je veux paraître comme tout le monde, je suis obligée de faire comme tout le monde. Dur physiquement et très dur psychologiquement. »
« L’objectif numéro 1 : cacher que je suis malade pour espérer un jour obtenir un CDI »
« Mon endométriose ne s’est vraiment manifestée qu’en fin d’études. J’ai donc eu la chance que celles-ci ne soient pas réellement impactées par la maladie.
L’arrivée dans le monde du travail a quant à elle été chaotique. Les difficultés ont commencé pendant l’errance. Au départ ma supérieure de l’époque était indulgente. Elle voyait bien que je souffrais. Et puis les examens médicaux négatifs s’enchaînent et les absences avec.
Et là on sent petit à petit la perte de patience mais aussi de confiance des collègues et des supérieurs hiérarchiques. On sent qu’ils se demandent si je suis pas un peu douillette, si je n’exagère pas un peu, si je fais pas ça pour ne pas aller travailler voire si je me fous pas carrément de leur gueule.
Et puis il y a eu le diagnostic et désormais l’objectif numéro 1 : cacher que je suis malade pour espérer un jour obtenir un CDI.
J’obtiens un nouveau boulot. Je tire sur la corde encore et encore. Et puis vient finalement l’annonce de l’opération et les trois mois de ménopause chimique qui la précèdent. Les 3 derniers mois de mon contrat, je suis donc en arrêt. On me fait comprendre qu’on m’en veut, que j’aurais dû dire que j’avais cette maladie.
Lors du premier mois de chômage vient donc l’opération et une énorme dépression qui va avec. C’est alors l’incapacité de travailler pendant 6 mois qui pointe le bout de son nez. On me sucre mon RSA parce que je suis en arrêt depuis trop longtemps. Si je veux avoir un minimum de revenu, je dois donc faire comme si j’étais en capacité de travailler.
Un an plus tard j’ai de nouveau un CDD (mon job actuel). J’évite les arrêts de travail pour être l’employée modèle et espérer un renouvellement ; mais aussi pour éviter les baisses de salaire et les jours de carence à répétition (3 dans mon cas).
Je vais au travail au bord du malaise. Parfois dans le métro à 8h alors qu’une heure plus tôt je perdais conscience sur le sol de ma salle de bain. Je passe donc mes week-end à récupérer un max de ma semaine sans vie sociale, sans sorties. Aujourd’hui je travaille toujours. Je ne sais pas combien de temps mon corps tiendra à ce rythme. J’ai conscience que mon avenir sera certainement précaire. »
2 réponses sur « Endométriose dans le monde du travail »
Dans un monde où rentabilité, productivité sont les maîtres mots, autant dire que travailler avec l’endométriose (à supposer que l’on puisse) c’est une réelle angoisse.
Merci beaucoup pour cette article ! Il est vrai que l’endométriose au travail est malheureusement encore trop peu représenté dans la presse/ média et en cela j’ai trouvé ces 2 témoignages touchants et enrichissants pour les futures recherches à venir.
Par ailleurs, est-ce qu’il serait possible d’en savoir plus sur les milieux professionnels dans lesquels les deux témoins ont évolué ainsi que leur âge et leur situation familiale ? Merci d’avance.