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Au quotidien Travail et précarité

Étudier avec de l’endométriose

Travailler avec de l’endométriose est parfois une gageure. Étudier dans de bonnes conditions l’est tout autant !

Tout mettre de côté pour s’occuper de sa santé

« J’ai découvert mon endométriose à la fin de ma licence d’italien. Je venais de recevoir un contrat pour partir travailler comme assistante d’italien dans un lycée près de Gênes. Je pensais pouvoir faire ma première année de master recherche en parallèle et à distance.

J’ai dû tout mettre de côté pour m’occuper de ma santé avec en vue des dizaines de rendez-vous médicaux: gynéco, généraliste, chirurgien, anesthésiste, médecins de la douleur, urologues, échographies, IRM, coloscopie, opération, infirmières à domicile,…

J’avais mal 3 semaines sur 4 et ma vie ne tournait plus qu’autour de la douleur. J’ai réussi à aller au bout de mon M1 en étudiant à distance depuis mon lit, moitié recherche, moitié convalescence et ménopause artificielle. J’ai ensuite passé quelques années à tâtonner pour trouver ma voie professionnelle, à faire des petits boulots de temps en temps au milieu de longues périodes de RSA. Mais qui dit boulot non qualifié, dit boulot physique et mon corps ne tenait pas le coup…

J’étais très flippée et désespérée de ne jamais trouver un boulot compatible avec mon endométriose… Je le suis encore pas mal et j’ai gardé le sentiment d’échec face à la vie. J’ai intégré le fait que j’allais vraiment galérer et rester précaire très longtemps.

Depuis quelques mois, j’ai entamé une reconversion professionnelle dans l’informatique. Ça me donne un peu d’espoir d’avoir un métier intéressant, pas physique, bien payé et qui ouvre donc à la perspective de pouvoir travailler le moins possible, à 60% ou 80% et en télétravail pendant les périodes douloureuses. Ça me semble un bon compromis même si je lutte quotidiennement contre ma fatigue chronique et la culpabilité liée aux arrêts maladies fréquents me colle encore trop souvent à la peau. »

Santé ou bourse, un choix impossible

« J’ai été diagnostiquée il y a plus d’un an après des examens suite à des consultations chez une gynéco pour des douleurs intenses.

Depuis mon état s’est empiré. Je suis en master 2 et boursière avec l’échelon le plus élevé. Ce qui veut dire pour moi que, ne pouvant me permettre d’avoir trop d’absences au risque de perdre ma bourse, je suis obligée parfois de me traîner jusqu’à la fac.

Je suis obligée de « choisir » entre ma santé et ma bourse qui me permet de vivre. Autant dire que le choix en réalité n’existe pas. »

Devoir forcer pour suivre, faute d’aménagements

« J’ai été diagnostiquée pendant un semestre qui était particulièrement intense scolairement. J’ai mené de front les cours et tous les devoirs à rendre avec les rendez-vous médicaux et les tâches administratives qui vont avec. C’était épuisant, physiquement, mais aussi mentalement. Je pense que ça a participé à la détérioration rapide de ma santé.

Cette année je suis à l’étranger et le rythme scolaire est bien plus calme. J’ai donc du temps pour me reposer et ne pas être en rush, c’est un soulagement. Mais l’année prochaine, je rentre en France pour mon master, et je vais à nouveau devoir forcer sur mon corps pour pouvoir suivre le rythme.

Je suis en train de voir avec mon école quels aménagements peuvent éviter que tout ça soit trop dur pour moi. Cependant, pour l’instant, il y a assez peu de choses disponibles. Je me prépare donc à devoir souffrir pour ce master.

Quant à la suite, c’est encore plus flou et angoissant. Je n’arrive pas à me projeter dans un métier avec toute cette douleur et cette fatigue. J’ai déjà dû abandonner des projets de stage par peur de ne pas arriver à être présente et efficace. Donc envisager de chercher un emploi et un poste stable me parait presque illusoire pour l’instant, c’est angoissant. Et ça semble tellement injuste de devoir limiter mon ambition parce que mon corps ne pourra pas suivre…

Essayer de me projeter dans l’avenir me provoque toujours de l’angoisse, mêlée à un sentiment d’injustice profonde et à de la colère contre un système qui n’a pas l’air vraiment déterminé à nous aider pour faire face à toutes ces difficultés. »

4 réponses sur « Étudier avec de l’endométriose »

Bravo pour tant de courage et d’obstination dans cette lutte continue. Visiblement les forces ne se mobilisent que si toute la société est concernée, c’est ce que le voit en ce moment avec le coronavirus.

Ça donne espoir ce message que tu diffuses!
Je suis aussi étudiante en Master à Paris et depuis le début d’année j’enchaîne les absences, les rendez-vous avec le médecin, le gynécologue etc pour savoir si j’ai de l’endométriose. Je suis sous pilule depuis quelques mois et rien n’a changé, la douleur me est perpétuelle, handicapante, fatigante et atteint le moral… Maintenant ce sont les rendez-vous avec la psychologue et la thérapeute qui s’ajoutent à tout ça pour arriver à garder le moral et ne pas angoisser sur la douleur…
La société et le monde universitaire a du retard sur cette maladie et j’espère que les choses vont bouger et que des solutions va être appliqué car actuellement c’est un handicap :/

Bonjour, je suis journaliste et je m’intéresse aux conséquences sociales/pro de l’endométriose sur les femmes, notamment qui sont obligées de renoncer à leurs études. Pensez-vous pouvoir me mettre en contact avec l’étudiante qui témoigne ci-dessus? Merci beaucoup d’avance, bien cordialement.

Bonjour Victoire,
Il s’agit de témoignages de plusieurs personnes différentes et qui ne sont plus étudiantes depuis.
Belle journée 🙂

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