Vous allez lire le témoignage d’une personne extérieure au collectif Nos Corps Résistants. Ceci est un texte personnel que nous n’avons pas modifié afin de ne pas altérer sa parole et son ressenti. Les propos tenus ici n’engagent qu’elle.
Ma nouvelle colocataire
Je m’appelle Ameline, j’ai 31 ans, une vie professionnelle active : office manager ayant repris une licence en droit RH, militante contre les violences conjugales et une vie sociale toute aussi active. Et puis ce jour de janvier 2020, cette IRM pelvienne, énième examen après 8 ans d’examens, ma vie bascule : endométriose stade 4. Tornade Endo vient d’entrer dans ma vie ! Ma nouvelle colocataire comme « j’aime » l’appeler.
Je suis là, seule dans la salle d’attente, la pluie ruisselle sur les vitres. Je ne connais de cette maladie que le nom et les douleurs occasionnées pendant les règles. Je suis là, au milieu de ces gens qui regardent mes larmes couler, perdue. Je ne comprends pas. Jamais je n’ai eu mal pendant mes règles, je n’ai jamais fait de fausses couches, je n’ai pas ces symptômes dont j’ai entendu parler.
Mon errance médicale
Tout a commencé il y a 8 ans, des problèmes intestinaux, des douleurs à l’estomac. Commencent de longs mois d’allopathie, d’examens, de gastro-entérologues qui me disent que je dois changer de métier, me relaxer, que je suis trop nerveuse, que je n’ai rien. Mais moi je sais, je sens. Au fil des années mon état se dégrade. Me voilà obligée de prendre quotidiennement des médicaments pour aider mes intestins à fonctionner, je ne peux plus manger ce que je veux. Mon corps rejette chaque année un peu plus d’aliments. Les doses de médicaments augmentent mais cela est toujours dans ma tête, je suis stressée. De violentes douleurs nocturnes me réveillent, mon ventre gonfle, mon estomac se tord.
Ce jour de novembre 2019, après de nombreux examens, je rencontre cette médecin qui me dit que mon anus ne fonctionne plus, de l’anisme. Elle évoque pour la première fois dans ces 8 années la possibilité d’une endométriose ; elle me dit que c’est rare, très rare sans douleur pendant le cycle mais possible. Et me revoilà, ce jour de janvier 2020 dans cette salle d’attente. Elle avait raison, je ne suis pas folle, je suis malade.
Je suis sonnée mais rassurée ! « Ameline tu vas être prise en charge, tes maux vont être apaisés ». Me voilà transférée en urgence dans un pôle « spécialisé ». J’ai de nombreux nodules sur mon ligament utéro-sacré gauche, mon rectum, mon colon, mon diaphragme. L’annonce de la maladie réveille des douleurs inconnues. J’ai mal. Mal quand je marche, quand je conduis, peu importe la période de mon cycle.
Une semaine après, je suis face à ce gynécologue, spécialisé m’a-t’on dit. On me demande si je veux un enfant, on me dit que je dois passer des examens supplémentaires, qu’on va me retirer ce jour mon stérilet au cuivre et voilà. Je repars avec une « jolie » ordonnance d’antidouleurs pour mes règles, une pilule, mais je ne comprends pas. Moi, je n’ai pas spécialement mal quand j’ai mes règles. Et mon ventre ?! Comment je fais pour manger normalement, est ce que je vais retrouver une fonction intestinale ? Quels risques je cours ? Pourquoi ce poids de la grossesse alors que je n’ai pas d’atteinte ? Me voilà bien plus perdue que cette journée de janvier. Deux semaines plus tard, me voilà sur la table de colo-scanner pour évaluer la profondeur de mes nodules. Cet examen devait être simple, mais la douleur me tétanise. Mes proches me récupèrent sur un fauteuil roulant. Je ne comprends pas pourquoi j’ai eu si mal. Est-ce que je suis plus malade que je ne pense ?
Je comprends que je vais devoir chercher
Arrive le Covid, aucun résultat ne me sera transmis. Je relance mon gynécologue, j’ai mal, la pilule ne fonctionne pas. Nous sommes en avril, la seule réponse que je reçois est ce courrier : « Il est normal que je saigne beaucoup, que mes règles deviennent douloureuses. Je dois laisser le temps à la pilule d’agir. L’atteinte digestive est profonde mais ne nécessitera une opération que si je souhaite avoir un enfant ». Je déchire ce courrier de colère ! Ce courrier n’est pas une réponse ! A cet instant, je regrette d’avoir été diagnostiquée. Je réalise, je comprends que je vais devoir chercher. Je suis seule face à ce système médical.
Alors je lis, beaucoup ! Je cherche, je comprends mieux comment ma maladie fonctionne, la possibilité bien que rare d’une atteinte digestive forte sans signe pendant mon cycle. Je regarde les médecines douces (jeûne, ostéopathie, naturopathie), je lis les témoignages, les essais cliniques en France, à l’étranger. Je réalise le nombre de femmes victimes d’errance médicale alors qu’1 femme sur 10 est atteinte d’endométriose. Et la réponse de la médecine : le néant ! Que ce soit à propose de l’endométriose ou des effets secondaires.
Me voilà en consultation en urgence en mai : douleurs à l’estomac, je ne peux plus marcher. Je suis mise sous morphine. Je décide de stopper mon traitement qui n’a rien amélioré à mon état. Je prends rendez-vous avec un ostéopathe, sollicite mon gynécologue « spécialisé » et là commence mon combat ! J’ai besoin de comprendre et je veux des réponses. Je découvre que mon dossier n’est pas passé en commission, ma colère grandit ! Qui est-il pour décider seul de ma vie ?! Qui est-il pour décider que je dois faire un enfant si je veux être soignée ?! Il répond à mes accusations et à mes questions.
Mon nouveau combat
Mais je refuse de me faire dicter mes soins par une médecine patriarcale, ne prenant en charge cette maladie que par le prisme de la grossesse ! Chaque endométriose est différente, chaque femme souffre différemment ! Nos soins n’ont pas à être soumis à un désir de grossesse. Il doit être pris en compte mais je refuse qu’il soit le curseur principal de soins de qualité !
Mon état de santé ne pourra pas s’améliorer je l’ai compris. Endo a pris trop de place mais le combat commence ! Un combat pour moi, pour soulager mes douleurs mais sans traitement lourd. Je refuse d’ajouter à l’endo les effets secondaires de traitement nullement curatifs ! Je réfléchis encore pour prendre ma pilule, mes antécédents neurologiques compliquant mon traitement par hormonothérapie. Le combat commence pour les jeunes femmes et les petites filles parce que je refuse qu’une maladie si répandue ne soit pas correctement diagnostiquée ! Parce qu’elle ne fait pas juste mal pendant nos règles, elle ne conduit pas juste certaines femmes à rencontrer des difficultés pour devenir maman. Elle nous grignote, nous épuise, nous culpabilise. Non, la souffrance n’est pas normale ! Nous ne sommes pas folles !
Si vous aussi vous voulez témoigner, que ce soit sur votre parcours ou sur un aspect de votre vie avec l’endométriose, vous pouvez me contacter via l’adresse temoignages@noscorpsresistants.fr après avoir lu notre charte des témoignages.
3 réponses sur « Témoignage – Cette tornade qui est entrée dans ma vie »
Bonjour,
Avez-vous entendu parler du Pr Roman à Bordeaux ?
Je ne sais pas où vous en êtes actuellement. Je serai ravi d’échanger avec moi.
Bonjour, j ai exactement les mêmes symptômes que vous. Avez trouvé quelque chose pour soulager vos douleurs ? Notamment celles de l estomac et les difficultés pour manger ? Merci d’avance pour votre réponse
Bonjour,
Il s’agit d’un témoignage que nous avons recueilli, la personne n’est pas membre ni inscrite sur le blog, et ne pourra donc malheureusement pas vous répondre